Présentation de l’artiste
Pour Rachel St-Pierre (dont le nom d’artiste est Rashël), l’art a toujours fait partie de sa vie. Par le dessin, pour commencer, puis par la peinture, la photographie, la création de bijoux, le vitrail, etc. Elle a laissé une carrière d’enseignante au secondaire pour se consacrer à temps plein à la peinture. Ces dernières années lui ont appris à développer son style, à peaufiner ses techniques, à se faire connaître en tant qu’artiste professionnelle, mais aussi à avoir confiance en elle. Au cours de sa carrière, elle a fait de nombreuses expositions personnelles et collectives dans des galeries d’art, des cafés, des bistrots, des bibliothèques, etc. En 2019, elle a exposé dans un musée d’art contemporain en France. C’est une artiste autodidacte qui a su percer les marchés de l’art et qui a fait l’objet de nombreuses parutions dans les médias. Sa technique de prédilection est la peinture et son style est reconnaissable du premier coup d’oeil. C’est un adroit mélange de naïveté figurative, d’audace innovante et de contemporanéité abstraite. Sa démarche prend sa source dans l’univers de la nature, des émotions et de la couleur. Ayant un profond respect pour le règne animal, ses sujets sont souvent animaliers. Elle utilise la peinture pour sensibiliser les gens sur les enjeux qui la touchent particulièrement, rendant son travail engagé dans une certaine mesure. Après avoir travaillé à l’huile pendant des années, Rashël utilise désormais l’acrylique et les techniques mixtes. Le mélange des médiums lui offre une plus grande amplitude dans le choix des textures. Les couleurs éclatantes, vives, fauves, font partie intégrante de sa démarche et caractérisent son travail. Ses couleurs sans demi-mesure symbolisent sa nature passionnée, ce tourbillon d’émotions vives dont son oeuvre est pétrie. Elle n’hésite pas à marier réel et imaginaire à travers des séries thématiques variées qui lui permettent de développer, d’approfondir et d’élaborer plus amplement la narration afin de faire réfléchir le spectateur.
Pour réinventer un marché de l’art à l’ère post COVID, à quoi doit-on renoncer ? À quoi doit-on s’accrocher à tout prix ?
Pour l’artiste, il est clair, pour réinventer le marché de l’art, il faut d’abord changer plusieurs choses.
«Nous devons renoncer à mettre tous nos oeufs dans le même panier, notamment par l’entremise des galeries d’art.» Les nombreuses fermetures des galeries d’art pendant la pandémie a laissé un goût amer aux artistes qui dépendaient d’elles pour exposer et vendre leur art. «Nous devons proposer notre travail autrement qu’en misant uniquement sur une présence physique en galerie d’art. La pandémie nous a bien démontré que les habitudes d’achat ont changé et que la fibre commerciale était plus fragile qu’on le croyait.» Les restrictions sanitaires ont affecté grandement les commerces en tout genre. Pour certaines galeries et lieux d’exposition (et de vente d’art), ces restrictions ont été carrément catastrophiques. «Les nombreuses fermetures (…), de même que les faillites, sont le reflet de la réalité actuelle.» Ce n’est pas seulement à cela qu’il faut renoncer selon l’artiste. «Je crois qu’il faut également renoncer à l’art élitiste dédié uniquement à l’élite sociale et intellectuelle. Les prix exorbitants de certains tableaux, et formes d’art, de même que l’intellectualisation à outrance de l’art contribuent à creuser un fossé de plus en plus grand entre l’art et la population.» Une démocratisation de l’art s’impose donc ainsi qu’un éclatement des possibilités numériques.
«Afin de réinventer le marché de l’art, nous devons nous accrocher à diffuser au maximum toutes les formes d’art. Ainsi, toutes les plateformes virtuelles et les médias sociaux deviennent de précieux outils pour diffuser notre travail, sans dépendre uniquement d’une présence physique. De plus en plus, le virtuel s’impose, en plus d’être facile d’accès et universel. Nous sommes à un clic d’une exposition, d’un événement, d’un tableau vendu. Nous devons également nous accrocher à rendre l’art plus accessible. Plus accessible à toutes les bourses, mais aussi à toutes les populations et types d’intérêts. En ce sens, il serait judicieux de diffuser l’art directement dans les milieux visés et non juste dans les galeries d’art afin d’aller à la rencontre des diverses clientèles. Je pense entre autres aux résidences de personnes âgées, aux milieux scolaires, aux établissements de femmes en difficultés, aux centres d’itinérance et de toxicomanie, par exemple. Ces milieux sont sous-représentés et nous aurions tout intérêt à les revaloriser, ne serait-ce que pour diffuser l’art, mais aussi pour faire naître de nouveaux intérêts bénéfiques à ces populations.»
L’artiste a des idées qui peuvent se concrétiser avec de la bonne volonté… si bonne volonté il y avait.
«Par ailleurs, je crois que, pour réinventer le marché de l’art, il faudrait absolument ramener l’art dans les écoles, et ce, dès la petite enfance! L’art est trop souvent perçu comme un loisir alors que les vertus thérapeutiques, créatives, calmantes et motrices sont évidentes et prouvées. Les enfants ont besoin d’exprimer leurs émotions et de créer. Pourquoi est-ce que l’art n’a pratiquement plus sa place dans les écoles après la maternelle? Il est nécessaire d’ouvrir la jeunesse à l’art, aux différents courants et techniques artistiques, aux grands maîtres et, surtout, à l’exploration de l’art! Je constate personnellement que l’art n’a pratiquement aucune place dans le cheminement scolaire de mon enfant. Quelques périodes par année et c’est tout… Comme si l’art ne voulait rien dire, comme si c’était la dernière matière à être abordée. Avec ce genre de vision, nous sommes en train de faire disparaître l’art visuel de notre société et de notre culture, tout simplement.»
Quels sont les défis et enjeux auxquels font face actuellement les artistes professionnels en arts visuels et quels seront-ils à l’ère post-COVID ?
Les défis sont nombreux. «Parmi eux, il y a bien sûr l’aspect financier et la visibilité. Nombreux sont ceux qui travaillent fort, moins nombreux sont ceux, par contre, qui réussissent à se tailler une place dans le milieu artistique. La plupart étant travailleur autonome, il est parfois difficile de prévoir les gains, les ventes et les succès. Les fluctuations sur le plan des revenus et des événements nécessitent une bonne planification de nos revenus et de nos horaires. Également, les artistes professionnels doivent être disciplinés et persévérants. Il n’est pas toujours facile de travailler de longues heures seul(e) dans notre atelier, de planifier, gérer les plateformes, développer son marketing et son image publique. Le travail et la discipline sont la clé.» Il est vrai, qu’aujourd’hui, on demande à un(e) artiste professionnel(le) d’être beaucoup plus. Il lui faut porter plusieurs chapeaux: artiste, marchand(e) d’art, publiciste, webmestre, attaché(e) de presse, secrétaire-comptable, livreur(euse), commissaire d’exposition, etc.
«À l’ère post-COVID s’ajoute d’autres défis. La compétition est plus forte que jamais, entre autres parce que de nombreuses personnes se sont découvert un intérêt pour l’art et ont décidé de proposer le fruit de leur travail. Nous assistons à une augmentation des artistes qui font de l’art par plaisir, en plus de leur premier travail (ou de leur retraite). Par le fait même, on assiste à des propositions de tableaux à prix ridiculement bas (donner son travail n’est pas mieux que le vendre à prix fou !). Ceci a pour conséquence de nuire à la profession et de dévaluer le travail des artistes de carrière.» Les artistes en arts visuels doivent tirer leur épingle du jeu dans un jeu de société grandeur nature où personne ne respecte les règles du jeu. Avec l’inflation galopante qui touche tous les marchés, les acheteurs d’art potentiels se tournent machinalement vers le beau-bon-pas-cher au détriment de la qualité artistique d’un(e) artiste de carrière, établi(e), qui tire l’entièreté de ses revenus de son travail acharné. «Nous assistons également à une montée du plagiat en tous genres. Plagier des oeuvres d’artistes établis, reprendre leurs idées et leurs techniques, copier à l’identique des tableaux qui sont populaires, sans parler de tous les plagiats de Disney, Marvel et compagnie… (…) Comment cela se fait-il? Comment sensibiliser au fléau du plagiat que subissent des milliers d’artistes alors que d’autres artistes et représentants de l’art en font la promotion, d’une certaine façon? Il y a beaucoup d’éducation à faire! En voilà un grand défi!» L’artiste parle de plagiat en connaissance de cause.
Pour survivre à court, moyen et long termes, l’artiste doit-il miser sur le développement de son public ou sur le développement de son art ?
La réponse est claire: «Les deux !» Pour survivre à court et moyen termes, Rashël a son mot à dire. «Je crois que l’artiste doit commencer par miser sur le développement de son public. Tout en peaufinant son art et en développant sa technique, il doit absolument élargir ses horizons, agrandir sa clientèle, développer son public, s’il veut se faire connaître et accroître ses ventes. Les réseaux sociaux sont excellents en ce sens. Ils permettent d’atteindre un maximum de personnes en peu de temps. Cela permet de développer une clientèle spécifiquement intéressée à son travail. Une fois cette clientèle établie, il devient plus facile de prendre du temps pour développer son art et ses techniques.»
Rashël jouit d’une certaine popularité sur les réseaux sociaux. Pour cette artiste, travailleuse autonome, qui a quitté la sécurité d’un emploi d’enseignement au secondaire pour la peinture, l’expérience des années échec-succès combinée à l’expérience des années de se relever et de travailler encore plus fort a fait ses preuves. Avec une sérieuse dose de détermination, de volonté à toute épreuve et de savoir-faire, elle a développé son public et son art. Aujourd’hui, Rashël vit exclusivement de sa peinture.
Sur Internet
https://fr-ca.facebook.com/rash.creations/
Chronique estivale 2022
présentée sur HEART, Au Coeur de l’art – magazine des arts
www.magazinedesarts.com