N’avez-vous pas remarqué que la société est d’une grande efficacité quand elle doit diviser pour mieux régner ?

Depuis mars 2020, les mesures sanitaires n’ont pas aidé certains travailleurs autonomes, comme les artistes et ceux qui ont des galeries, des studios ouverts au public, des écoles d’art à faire tourner. Cela a créé beaucoup de confusion, de déception et de désespoir chez certains qui ont vu des contrats annulés, des expositions reportées, une perte importante de revenu, un éloignement physique d’avec leurs proches, une solitude imposée, etc.

Au niveau de l’art et la culture, c’est la catastrophe, même si certaines personnes (qui occupent de hautes fonctions au sein de la société) osent dire1 que l’art est juste un divertissement pour s’aérer la tête (ce qui est une vision vraiment étroite de l’art). Plusieurs lieux de diffusion (des galeries, des écoles d’art et des centres d’art autogérés) de même que certaines revues d’art (qui, pourtant, étaient des institutions dans leur domaine) n’existent plus à cause de la pandémie. La société ne voit pas les artistes (toutes disciplines confondues) comme une nécessité (un service essentiel) au bien-être de la communauté. L’économie a été malmenée par les nombreuses fermetures, les confinements, les couvre-feux, etc. La culture – qui a toujours été l’âme d’un peuple – est en train de se réduire comme peau de chagrin. Dans une société qui n’a aucune boussole pour s’orienter vers l’avenir, dirigée par un gouvernement qui navigue à tâtons et à l’aveuglette à coup de décrets pour imposer ses décisions, les artistes se sentent encore plus mal compris qu’avant la pandémie. Un malaise général entoure maintenant la communauté artistique (les arts de la scène ont été malmenés avec la fermeture des salles de spectacle, la littérature (incluant tous les gens qui découlent de l’industrie du livre) a été malmenée avec la fermeture des librairies, des bibliothèques et des commerces reliés au milieu de l’édition, de la traduction et de la diffusion littéraire, les arts visuels sont évidemment très touchés par les mesures gouvernementales. Les musées, les galeries, les centres d’art, les maisons de la culture, les studios, les ateliers d’artistes autonomes, etc, tous ces gens qui dépendent de ces lieux de diffusion, sont des personnes qui veulent vivre de leur travail3. Ce sont des gens qui ne souhaitent pas qu’on leur fasse la charité fédérale à coup de PCU, PCRE, PCTCC et autres acronymes d’aides gouvernementales d’Ottawa. On assiste depuis mars 2020 à une réelle détresse psychologiques chez les artisans et les artistes.

Le gouvernement est prêt à payer des appareils2 à 250 000 dollars pour aider à contrer la dépression (l’IUSMQ n’a qu’un seul appareil pour le moment et le délai d’attente pour ce type de soins peut aller jusqu’à huit mois), alors qu’il s’agirait de laisser l’art vivre et rayonner au sein de la société. Un billet de théâtre, un billet de spectacle, une entrée dans un musée, l’achat d’un livre ou d’un tableau qui fait rêver, etc. pourraient aussi grandement aider à contrer la dépression chez la population et aiderait les artistes à se sentir utiles au lieu de les rabaisser au niveau du plancher en disant que l’art n’est qu’un passe-temps au même titre que la philatélie1. L’art peut vraiment aider à vivre. L’art peut aider au mieux-être, pas juste d’une personne, mais d’une collectivité entière. L’art est thérapeutique, autant pour l’artiste qui se libère de ses tensions en s’exprimant à travers son art que de la personne qui se reconnaît et trouve écho dans ce qu’elle voit ou de ce qu’elle entend. L’art est l’une des rares choses au monde qui provoque la sécrétion dans le cerveau d’hormones de plaisir (comme on le sait, la sérotonine, la dopamine, l’ocytocine et les endorphines favorisent des sentiments positifs comme le bonheur et l’amour qui font fuir l’état dépressif). C’est quelque chose de vraiment plus durable qu’une machine coûteuse2 qui envoie des influx électriques dans le cerveau d’un individu pendant quelques semaines pour stimuler des zones précises qui vont l’aider à sécréter des hormones. La société actuelle a besoin, plus que jamais, de laisser vivre ses artistes3, d’ouvrir les lieux où ils peuvent s’exprimer, s’exposer et vendre le fruit de leur travail. Une société sans culture, sans art, est une société morte cérébralement. Pour reprendre la phrase de la ministre de la culture du Québec, Nathalie Roy: «La culture, c’est l’âme d’un peuple, c’est son essence, c’est ce qui le distingue. Ce sont ses rêves, ses aspirations, ce dont il a peur, ce en quoi il croit. Alors on est très très loin d’un divertissement.»4. Il faut cesser d’investir dans des choses mécaniques pour contrer la dépression collective. Il faut commencer à investir dans l’humain (nos artistes). Ces artistes d’aujourd’hui et de demain, il faut les encourager dans leur art car ils font un travail essentiel au mieux-être, au bien-être, au réveil des consciences, à la connaissance générale, etc.

Plus qu’avant la pandémie, les artistes doivent se sentir « investis » d’une mission: celle de transmettre le beau, le vrai, la lumière, de faire ressortir le bon en chacun de nous par l’ouverture à l’autre et par le partage3; des choses absolument très humaines, qui ont été oubliées par ce monde dans lequel nous survivons. Il est grand temps de redevenir humains et bienveillants, de laisser de côté les machines et les médicaments qui nous donnent du bonheur artificiel, de commencer à se tourner vers ces êtres doués d’une sensibilité toute particulière qui vont nous montrer la lumière au bout du tunnel. Rechercher le bonheur, le vivre à travers un sentiment véritable, aucune machine ne peut y arriver car c’est un état d’esprit, un état d’être, un état d’âme. Il n’est pas trop tard pour se tourner vers la paix intérieure et le bonheur en remontant jusqu’à la racine de la cause de ce mal-être sociétal pour l’identifier et le transformer.

Depuis quand la division mène au bonheur alors que l’union a toujours fait la force ?

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Sources:
1. Voir l’article – Le Dr Boileau qualifie la culture de « divertissement »; le milieu culturel heurté
2. Voir l’article – Un nouvel appareil pour traiter les personnes dépressives à Québec
3. Voir l’article – Quand le rideau tombe à jamais
4. Voir l’article – La culture n’est pas un divertissement, selon la ministre Nathalie Roy