Jean Potvin est un artiste multidisciplinaire de Québec, diplômé en dessin industriel. Il a longtemps mené une double carrière professionnelle avant de devenir artiste à plein temps en 2002, après avoir débuté la peinture en 1972. Il s’est fait connaître notamment par son travail artistique, mais aussi par son engagement dans diverses associations d’artistes. C’est un homme qui a toujours contribué très activement à maintenir vivant le milieu des arts visuels dans la région de la Capitale-Nationale.
Pour vous, l’art doit-il représenter le réel ou, au contraire, doit-il éloigner du réel pour proposer un univers où tout est plus pur, plus beau, plus léger ? Pour vous, la contemplation de l’art doit-elle libérer du fardeau quotidien et proposer un plaisir esthétique ou doit-elle redonner du sens au quotidien afin de pouvoir le vivre avec plus de force et d’acceptation ?
Pour cet artiste engagé, l’art figuratif part du réel pour ensuite être interprété par celui qui livre le message ou l’idée qui saura faire réagir le public à coup sûr. «La personne qui regarde, contemple ou simplement examine, le résultat de la réalisation qui lui est présenté sous la forme d’un tableau n’est pas nécessairement en face d’un univers où tout est plus pur, plus beau, plus léger».
Jean Potvin qui apprécie représenter un certain réalisme social n’édulcolore pas les scènes de solitude qu’il voit sous ses yeux lors de ses promenades. Le misérabilisme n’a pas à être plus beau pour être mieux accepté. L’artiste, qui met souvent le doigt sur un aspect de la société que plusieurs voudraient ignorer, livre un double message, parfois de façon ironico-cynique, pour souligner l’absurdité d’une situation bien réelle.
«L’oeuvre doit être esthétique et représenter une façon personnelle de voir certaines choses. Elle doit être originale et il faut qu’elle représente la vérité telle que vue par l’artiste».
Nul ne peut se voiler la face devant une oeuvre engagée de Jean Potvin qui déstabilise le public devant cette criante vérité. L’artiste exprime des sujets qui ne sont pas au goût de tous, mais il a le mérite cependant de peindre le réel, tel qu’observé.
«L’homme reproduisait instinctivement déjà des oeuvres d’art à sa façon sur les murs des cavernes qu’il habitait pour laisser inconsciemment sa trace» car l’art est aussi une façon de laisser des traces derrière soi. «Un tableau est une oeuvre d’art qui doit diriger celui ou celle qui se donne la peine de le regarder vers la constatation d’un ressenti qui lui fera se créer sa propre opinion. En ce sens, la contemplation de l’art peut temporairement libérer du fardeau quotidien et proposer un plaisir esthétique. Si c’est le cas, tant mieux!»
Or, pour Jean Potvin, le but premier n’est pas d’offrir un divertissement visuel. Pour lui, le but premier c’est d’exprimer et de faire comprendre son regard sur un lieu, un fait, un évènement qui a servi à déclencer le désir de prendre la parole par la peinture.
«La contemplation de l’art peut avoir, jusqu’à un certain point, pour but un message qui donne, à l’occasion, un sens au quotidien par sa beauté et son esthétisme sans toutefois associer contemplation avec beauté». Il ne faut pas confondre beauté du travail avec beauté de l’image représentée, explique-t-il en entrevue. «Si l’art était uniquement dans le but de beauté de l’image, beaucoup d’oeuvres n’auraient jamais été créées».
Jean Potvin fait un lien avec Toulouse-Lautrec qui a représenté des prostituées et Goya qui a montré la vieillesse comme un naufrage des corps ou le port de la croix de Jérôme Bosch. Toutes ses oeuvres n’auraient jamais existées si l’art devait n’être qu’esthétique et enchantement visuel.
«Donc, la contemplation de l’art peut redonner du sens au quotidien afin de pouvoir le vivre avec plus de force et d’acceptation en considérant que, dans l’art, même la laideur exprimée avec talent est magnifique».
Jean Potvin prend acte et montre à travers l’art ce qu’il a vu, même s’il s’agit d’une situation singulière, insolite ou lamentablement pittoyable, comme d’autant de phénomènes sociaux qui ne vont pas de soi et qui confèrent à son art une puissante critique sociale. Loin d’enfermer le spectateur dans un monde imaginaire, il l’incite à questionner sur ce qu’il voit, afin que les choses changent par de petits gestes posés au quotidien, afin d’améliorer le monde dans lequel nous vivons en collectivité.
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