Le Canada est l’éternel absent du top 20 des pays classés par produit de ventes d’art contemporain. Les trois plus grands vendeurs sont les Etats-Unis (43% de part de marché), la Chine (23,5 % de part de marché) et le Royaume-Uni (22,1 % de part de marché). La France arrive en 4e position avec une petite part de marché de 2,4 %.
Le rapport sur le marché de l’art contemporain 2017
Après 18 mois de ralentissement, l’ensemble du marché de l’art repart à nouveau.
D’après le Bilan du Marché de l’Art du premier semestre 2017, publié par Artprice, leader mondial de l’information sur le marché de l’art, ce rétablissement repose en grande partie sur les performances de l’art contemporain.
Bien que les chefs-d’œuvre anciens deviennent de plus en plus rares sur le marché, parce qu’ils sont littéralement absorbés par les musées, ce n’est pas par dépit que les collectionneurs se tournent, toujours plus nombreux, vers l’art contemporain, le segment le plus exaltant du marché, qui représente à lui seul un extraordinaire vecteur de reconnaissance sociale et un immense potentiel financier.
Une parité hommes-femmes pointe à l’horizon
Michael Govan, directeur du Los Angeles County Museum of Art (LACMA), explique la domination de l’art contemporain dans les programmations muséales par le fait que les expositions ne peuvent plus être dominées par des artistes mâles blancs.
La création contemporaine se distingue maintenant des périodes antérieures par une bien plus grande diversité (tant au niveau du pays d’origine de l’artiste que de son genre). Cette meilleure parité de l’art contemporain sert non seulement les intérêts des institutions diffuseurs d’art, mais aussi ceux des fondations, des mécènes, des commissaires d’expositions, des journalistes spécialisés en art (critiques), etc.; tous les acteurs du milieu qui achètent, exposent, critiquent et récompensent l’art. On ne parle plus de cercle vicieux, mais de cercle vertueux qui a des répercussions sur le marché.
Même si beaucoup pensent que les conseillers ne devraient pas influencer les preneurs de décisions dans le choix des programmations, leur enthousiasme peut être contagieux et ce, particulièrement quand ils sont prêts à financer les projets qui les passionnent le plus. Au-delà de l’investissement, le collectionneur d’art contemporain a le sentiment de prendre part à l’Histoire de l’art, donnant son assentiment, son appui, en reconnaissant la valeur d’une œuvre. Celui-ci se positionne et s’engage
Il y a 30 ans, un groupe d’artistes féministes, les Guerrilla Girls, a commencé à dénoncer publiquement la domination des hommes sur les femmes dans les collections muséales. Leur slogan à l’époque « Faut-il que les femmes soient nues pour entrer au Metropolitan Museum ? ». La présence des femmes dans les musées passait volontiers par leur mise à nu en tant que sujets plutôt que par l’exposition de leurs propres oeuvres. Les femmes, sous-représentées au sein des institutions culturelles, l’ont également été d’un point de vue purement commercial. La valeur des oeuvres faites par des hommes était nettement supérieure aux oeuvres réalisées par des femmes. Il a fallu que ce slogan-choc fasse son chemin pour voir une évolution. Sur le marché haut de gamme, de récents records d’adjudications ont prouvé que la valeur d’une signature est de moins en moins liée à une histoire de sexe.
Des changements sont véritablement en cours pour tenter de combler le fossé qui, à l’heure actuelle, représente 86 % d’hommes contre 14 % de femmes dans le top 500 des artistes les mieux cotés au monde.
Untitled (1982) de Jean-Michel Basquiat, la plus chère au monde
Les 110 487 500 $US déboursés le 18 mai 2017 à New York pour une toile de Jean-Michel Basquiat consacrent clairement la nouvelle dynamique qui anime le marché de l’art contemporain. Elle a été acquise par un collectionneur japonais de 41 ans, Yusaku Maezawa. Untitled (1982) est sans conteste l’œuvre contemporaine la plus chère au monde ! Le prix de ce record historique a dépassé toutes les prévisions, celles de la maison de ventes Sotheby’s qui la garantissait à hauteur de 60m $US et celles de l’acheteur lui-même qui ne s’attendait pas à voir le prix grimpé aussi haut.
L’an dernier, le même acheteur avait déjà établi un important record pour Jean-Michel Basquiat en achetant 57,3m $US une toile similaire, elle aussi sans titre et datée de 1982. La différence de prix (presque du simple au double) est d’autant plus surprenante que la première peinture était bien plus grande que celle remportée cette année.
Le succès de Jean-Michel Basquiat est non seulement exponentiel mais aussi mondial, comme le prouve le destin de la toile Water-Worshipper (1984). Sur les 30 dernières années, elle a été successivement vendue à New York, Paris, Londres et enfin à Hong Kong, et les transactions se succèdent à un rythme de plus en plus rapide.
Les résultats en ventes publiques attestent clairement que les échanges s’accélèrent et s’internationalisent. L’offre se renouvelle sans cesse et le nombre de collectionneurs se multiplie. L’art contemporain s’affranchit peu à peu des règles traditionnelles du marché de l’art. Celui-ci s’ouvre enfin pleinement aux femmes, au Street Art, aux collectifs, etc. Il gagne en liquidité ainsi qu’en efficacité, toujours selon Artprice.
Seriez-vous étonnés d’apprendre qu’entre juillet 2016 et juin 2017, le chiffre d’affaires de l’art contemporain a atteint les 1,58 milliards de dollars US ?
Un petit historique qui mène à cette nouvelle conjoncture
Les années 2013 et 2014 constituent une période historiquement faste pour l’art contemporain. Cet engouement est symbolisé par l’extraordinaire vente à 58m US$ de la sculpture Balloon Dog (Orange) (1994-2000) de Jeff Koons. Celle-ci reste aujourd’hui encore un record absolu pour un artiste vivant. Les cotes de plusieurs jeunes peintres abstraits (moins de 35 ans) ont largement bénéficié de cette effervescence, le prix de leurs œuvres se voyant parfois démultiplié en l’espace de quelques mois. Face à cette brusque envolée de prix, les collectionneurs ont hésité, et se sont retournés vers des valeurs sûres.
Au cours de l’année 2015, l’art contemporain s’est vu dépassé par l’art moderne, le rythme étant imposé alors par les nouveaux sommets atteints par ce segment. Les montants déboursés pour acquérir trois chefs-d’œuvre signés Picasso (179m $US), Giacometti (170m $US) et Modigliani (141m $US) ont toutefois donné l’effet d’une urgence, celle d’acquérir les dernières merveilles d’un marché quasiment épuisé, de mettre la main sur des œuvres destinées à rejoindre tôt ou tard un grand musée. Durant cette période, les hésitations des collectionneurs vis-à-vis de l’art contemporain ont eu un impact sur les performances de ce secteur, enregistrant une diminution de -27 % pour 2015/2016.
La reprise du marché de l’art au premier semestre 2017 se révèle donc d’autant plus remarquable qu’elle place l’art contemporain au premier plan.
Concrètement, l’art moderne reste le poids lourd du marché, mais le XXIe siècle assiste bel et bien à l’avènement de l’art contemporain. Bien plus que l’art d’après-guerre, celui-ci s’affirme sur le long terme. En 2000, l’art contemporain pesait 3% du produit des ventes mondial; 17 ans plus tard, sa participation atteint 15%.
La signification de ce changement est claire: les collectionneurs valorisent de plus en plus fortement la création actuelle. Désormais, l’art contemporain ne peut plus être considéré comme un marché marginal, en proie à des pratiques hasardeuses. Avec l’art d’après-guerre, il tient à présent le rôle de “locomotive” du marché mondial de l’art. L’art contemporain constitue réellement un investissement compétitif et alternatif aux marchés financiers, qui depuis 2007 ne se sont jamais réellement relevés.
Source: Artprice
Le rapport sur le marché de l’art contemporain 2017
Le Bilan du marché de l’art S1 2017