Par HeleneCaroline Fournier
Un émotionniste métaphysicien
« Si l’être humain n’est qu’un tout petit élément infiniment insignifiant face à l’univers dont il ne connaît que très peu la diversité et l’étendue, il n’en reste pas moins en perpétuelle recherche sur lui-même, sur les autres et ce qui l’entoure. Mais certains face au vertige du grand gouffre préfèrent détourner les yeux et s’abstraire de ce destin commun et se contenter, pure illusion, de posséder. Quand l’individu disparaît la matière conserve la trace de son passage pour nourrir ceux qui viennent après lui de ce qu’il a pensé. » (Thierry Ozoux)
Thierry Ozoux fait son entrée à l’École des Beaux-Arts de Toulouse (France) en 1975. Dans les années qui suivent, il expose au Centre Culturel de Montauban et au Centre Culturel d’Antibes. Ces deux premières expositions impressionnent d’une part, par le reniement de la forme en vogue de l’époque et pour le message qu’il livre aux amateurs d’art sur le droit à l’artiste de disposer de tous les outils jugés utiles et nécessaires pour exprimer avec plus de justesse sa pensée. Refusant de s’investir dans une démarche commerciale, Thierry Ozoux, dit Théo, se libère de toutes contraintes pour privilégier la réflexion, mais surtout pour « servir » l’évolution artistique. En 1991, il est présélectionné pour la décoration des stations de métro de Toulouse. En 1995, il expose sur le thème « le paysage féminin ». Cette exposition axe définitivement sa peinture vers le nu artistique. Ce sera une évidence pour l’artiste. Dès lors, le nu devient le centre de gravité de ses réflexions, le point de départ de ses explorations, le refuge de sa méditation. En 1997, il obtient le 3ème prix au concours « Gif’Art » avec la collaboration de la Galerie Empreinte d’art de Gragnague en France. Ses expositions rythment le cours de sa carrière en tant qu’artiste peintre. En 1999, un dialogue s’installe entre textes poétiques et peintures. « La trace cosmique du vivant dans l’espace et le temps » est un thème qui met en relation le symbolisme et la dynamique des énergies cosmiques qui interfèrent avec la matière. En l’an 2000, Thierry Ozoux se joint au sculpteur Frédéric Valladares et d’autres artistes du mouvement qu’on appellera plus tard « les émotionnistes » (plasticiens, volumiciens, scénographes, etc.) pour créer des oeuvres originales visant le dialogue émotionnel avec le public. C’est une autre dimension de l’art qui s’entrouvre. En août 2000, l’artiste participe à une exposition internationale à Pékin. Il est sélectionné pour exposer au musée d’art contemporain de Pékin. L’artiste ne s’arrête pas là. En 2003 et 2004, il étudie la peinture décorative et le trompe l’oeil. En 2005, il participe à une installation de toiles et de structures en zinc qui pose un regard différent sur l’art dit « contemporain ». Sa formation se poursuit en 2005 et 2006 avec la peinture en bâtiment. Il coréalise ainsi une fresque immense en 2006. Thierry Ozoux est un métaphysicien de l’art actuel, un artiste inspiré, authentique dans sa démarche, qui ne laisse décidément pas le public insensible. Dans l’atelier de l’artiste, on retrouve « mes pinceaux surtout les plus vieux, même si je les utilise que dans des cas très précis ». Etalés autour de lui : tubes d’acrylique, pots de peinture et matériaux divers qui entrent dans la composition de certaines de ses oeuvres. « J’ai aussi besoin de garder sous les yeux mes toutes dernières toiles pour comprendre les liens qu’elles génèrent pour aboutir au travail en cours ». L’artiste a besoin de silence et de solitude dans ses phases de réflexion créative et de sa « mise en résonance sensible et méditative ». Ces moments ne précèdent pas forcément l’exécution immédiate d’une toile, mais sont néanmoins nécessaires dans le cheminement qui mène à la création. L’artiste puise ses idées à l’extérieur et se réserve la réalisation pour l’intérieur. « Je peins et dessine en permanence à l’extérieur de mon atelier, mais sans mes pinceaux. En effet, chaque objet de la nature, chaque individu, chaque animal possède une histoire, un monde intérieur que cache son enveloppe corporelle. Visuellement, cette enveloppe m’est accessible et je prends toujours un temps pour tenter par la résonance sensible de découvrir ce qu’elle cache. Je redessine mentalement (avec mes critères techniques des arts plastiques) cette enveloppe en gommant ce qu’elle cache et en mettant en exergue ce qui en transparaît. » Il s’aide d’un carnet de croquis et, sitôt de retour à son atelier, la tête pleine d’éléments accumulés, la phase de réflexion peut débuter. L’artiste fait alors le tri des sentiments les plus forts et les plus pertinents puis utilise cette force, cette énergie, pour alimenter sa phase de méditation qui aboutira à des choix esthétiques de réalisation. Son atelier se compose de deux parties superposées : la pièce du bas qui est essentiellement consacrée à donner des cours ou à exposer des toiles ou des projets de fresque et la partie supérieure (voir ci-contre) en forme de rochelle semi-ouverte sur le bas qui est son lieu intime, sa « tanière », dans laquelle ne pénètrent que ceux qu’il invite. La lumière prend une part fondamentale dans son oeuvre. Après la façon des Impressionnistes qui ont remplacé les plans du tableau classique par des plans rendus par des lumières et des ombres construites par des couleurs et, au-delà des Modernes et des Avant-gardes qui ont, eux, déstructuré la forme pour la réinterpréter, Thierry Ozoux s’inscrit inévitablement dans cette continuité avec toujours cette vision métaphysique de l’oeuvre peinte. « Je cherche à comprendre notre univers fait de matières vivantes et de matières inertes orchestrées par des énergies en mouvement. La lumière est une interface fondamentale entre ces énergies et la matière ». De même que la lumière fait partie de son univers artistique, l’espace est primordial dans l’expression de son travail. L’espace, c’est le lieu des affrontements cosmiques, des transformations, des combats d’énergies, de la révélation de la lumière aux matières. « Chacune de mes toiles est un coin d’espace de l’infiniment grand et de l’infiniment petit dont le spectateur détient le secret ».