Par HeleneCaroline Fournier

Une féministe hors normes

Après des études de théâtre avec des professeurs telles que Muriel Chaney, Lise Delamare et Madeleine Robinson, Sylvie Pothier exerce son métier de comédienne et de metteur en scène. Fascinée d’une part par la lumière et, d’autre part, par les couleurs, elle apprend à peindre auprès de scénographes. Elle quitte ensuite Paris pour se consacrer entièrement à la peinture. Elle peint principalement des corps et des visages à la recherche de la Femme, seule source de vie.

Sylvie Pothier est une femme qui porte son regard sur les autres. Toute sa peinture est un témoignage et un engagement pour tenter de faire comprendre la souffrance universelle et dénoncer les abus faits à ses contemporaines. Femmes grillagées, mutilées, opprimées, abusées… sa peinture porte en elle ses propres stigmates. Au cours des années, Sylvie Pothier a été adhérente au groupe Negard, présidé par Elisabeth Badinter, qui avait pour but la mise en place d’écoles pour les jeunes Afghanes. L’artiste a toujours évolué avec des oeuvres dédiées à la condition féminine. Ses collages, en effet, annoncent clairement quelques gros titres de la presse écrite qui évoquent parfois le silence des médias face aux inégalités. Figure emblématique, Sylvie Pothier, n’hésite pas à montrer l’exemple de la solidarité le 8 mars – journée internationale de la femme – Mali, Palestine, Afghanistan, Yémen, Birmanie… lapidation, excision, viol, mutilation, etc. autant d’endroits que de tortures. Il est vrai que l’oeuvre interpelle au premier regard ; son art n’est pas ludique ! Il suscite d’emblée le questionnement. Pour l’artiste, l’art doit aiguiser et remuer les consciences, donner du sens en parlant du monde présent, tel qu’il est, avec ses drames et ses souffrances – celles des femmes en tout premier lieu. Comme tous les artistes d’importance, Sylvie Pothier apporte sa propre vision du monde et pousse les amateurs d’art à se questionner sur les choses essentielles de la vie, celles qui ne sont pas superficielles. Peindre pour délivrer un message, un cri, un appel au réveil !? Pourquoi pas ! Son art se nourrit d’un style personnel, moderne, contemporain, avec des lignes épurées visant davantage l’essence que l’esthétisme. Elle n’est pas la seule artiste a avoir utilisé l’art pour délivrer un message engagé. L’art est également une arme, une arme précieuse pour combattre la tyrannie du spectacle passif. Avant elle, Frida Kahlo, peintre mexicaine, s’inspirait de sa propre souffrance. Sylvie Pothier peint toujours en intérieur et s’entoure de petits objets qui rendent son atelier confortable et agréable. La musique, par exemple, fait partie intégrante de son univers de création. Son atelier est situé au premier étage de sa maison, c’est un loft qui comprend également un lit et une télévision. Son aire de travail est toujours le même, là où se trouve son chevalet, là où elle se sent chez elle. Il lui arrive même de travailler par terre ! Son antre est totalement privé. Elle y peint de jour comme de nuit. Le processus de la création de Sylvie Pothier débute dans son esprit où elle voit sa prochaine toile, l’après-midi et le soir sont ses « périodes d’exécution ». Elle se perçoit plutôt comme une « exécutrice » que comme une « créatrice ». Elle compare la peinture à l’acte d’écrire… et tel un auteur, personne ne peut regarder son travail avant qu’il ne soit terminé. La luminosité et l’espace n’influencent pas sa peinture, la taille de l’atelier non plus. Pour elle, la créativité, d’un point de vue global, est « d’être un témoin de son temps » donc être libre de peindre et de dire ce qu’elle veut… et elle le fait au nom des femmes.

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