Par HeleneCaroline Fournier
E n art, le nu désigne la représention du corps humain dénudé. D’ailleurs, le terme « nu », en tant que thème artistique, appartient au vocabulaire des Beaux-Arts depuis le XVIIe siècle. À travers l’histoire il fut le miroir des implications psychologiques, philosophiques et esthétiques du corps dans des sociétés données; cet exercice constamment renouvelé est une tentative qui, par une voie sensible, définit l’être humain, souvent dans son acception « naturelle ». Plutôt que le sujet représenté lui-même, c’est une forme d’art qui essaie de recréer une image du corps humain, tout en respectant les exigences esthétiques et morales d’une époque, à travers la peinture, la sculpture et maintenant à travers la photographie. Depuis la préhistoire, la représentation des corps nus est l’un des thèmes les plus importants de l’art. C’est donc sans fausse pudeur que quinze artistes présentaient leur conception au naturel du corps humain dans l’exposition « Mise à nu » du 23 septembre au 4 octobre 2009 à L’espace contemporain galerie d’art. En octobre 2008, L’espace contemporain avait proposé « Les états du corps » dont un article avait été écrit sur cette exposition où le public en était ressorti ébloui et émerveillé par la grandeur des créatrices et créateurs qui exprimaient à leur façon quelque chose de transcendantal dans la continuité des artistes qui avaient fait l’histoire de l’art depuis des siècles. Les récidivistes de cette année dans « Mise à nu » sont: Michel Giguère, Louise Jobin, Nicole Mongeon-Cardin, Yves Robert et François Roy. Auxquels se rajoutent: Marie-Dominique Bédard, Martine Gautier Mourre, Danielle Gauthier, Janick Laberge, Sylvie Lagrange, Francine Leroux, Edith Liétar, L’OR, Jean Martel et Patrick Ouellet.
CRITIQUE
J ean Martel présentait “La cité féconde” une oeuvre digne de mention aux multiples influences dans une interprétation toute personnelle; un mélange d’extase graphique et de déliés sensuels. Patrick Ouellet présentait une oeuvre qui s’harmonisait avec son voisin d’exposition dans des couleurs vives, d’ombres accentuées au relief particulièrement vivant qui avoisinaient les peintures sur corps de Yves Robert et deux de ses aquarelles particulièrement très douces. Yves Robert exploitait dans cette exposition son sujet de prédilection. Michel Giguère qui s’est consacré à la recherche ces derniers temps proposait au public cinq oeuvres sur masonite. Des oeuvres bien exécutées aux formes masculines esquissées, collées et adroitement agencées. Nicole Mongeon-Cardin présentait un dessin au fusain et crayon, lithographie sur tissu, dans le genre simple et délicat. Edith Liétar présentait trois acryliques. Une belle composition féminine et masculine dans une texture dynamique qui souligne la liberté de la silhouette dans une contemporanéité stylistique. Francine Leroux exposait sept techniques mixtes vernies, toutes exécutées dans une palette de couleurs chaudes et froides; un éclat de vigueur au naturel rehaussée de collages ponctuels. L’OR nous faisait découvrir par ses pastels, acryliques et techniques mixtes, un mouvement moderne sur fond noir. Un mystère avec des couleurs vives qui vont très bien ensemble. La composition centrée est au coeur des courbes soulignées et mérite une mention. Danielle Gautier pose le ton avec sept techniques mixtes, sept petites femmes silhouettées, à la frontière de l’art brut mais tout de même poétique avec des titres révélateurs. Louise Jobin, artiste multidisciplinaire, nous livrait un pastel sec sur canson, une étude du corps féminin exploitée avec une aisance instinctive et un croquis au graphite; une série de mouvements croqués. François Roy mérite une mention spéciale avec son “Mise à nu” de 100 cm x 150 cm, une oeuvre vernie au relief époustouflant. Sans doute la pièce maîtresse de cette exposition thématique qui étonne par son expressivité sculpturale aux couleurs partagées. Martine Gautier Mourre (Martine Gautier du Balzac) qui endosse une vue de l’esprit d’un ballet d’ombre et de lumière dans une certaine naïveté explicite. Janick Laberge, l’exploratrice du dualisme dans ses représentations visuelles, présentait deux oeuvres dont le traitement des bandes de couleurs contribuait à donner une dimension nouvelle à la modernité. Sylvie Lagrange donnait une touche picassienne à cette exposition avec des couleurs rarement exploitées dans une gaieté naïve et ludique. Marie-Dominique Bédard, fascinée par les contrastes des couleurs et des formes, libérait du ciel deux anges peints en blanc et exposés pudiquement aux yeux du public dans un naturel rafraîchissant.
Cette exposition est une mise à nu de l’âme des artistes; une présentation avant tout esthétique et nullement pornographique.
Article tiré de la revue L’ArtZoomeur (Dossier: Critiques d’art) vol. 2