CHRONIQUE SUR LA FRANCOPHONIE DANS LES ARTS VISUELS AU CANADA
Cette série d’articles sur la réalité quotidienne des créateurs en arts visuels francophones et francophiles vivant dans un milieu à prédominance anglophone se poursuit. Cette chronique est une initiative personnelle d’HeleneCaroline Fournier, experte en art, théoricienne de l’art et journaliste indépendante, qui a à coeur la francophonie pancanadienne et le marché de l’art du pays.
Qui sont ces artistes francophones et/ou francophiles et quelle est leur réalité au quotidien ?
Karen Blanchet est une anglophone francophile très impliquée dans la communauté francophone d’Edmonton en Alberta. Elle a épousé un Franco-Albertain. A la maison les deux langues sont parlées. Elle a étudié au Canada et en Australie. Elle a étudié les beaux-arts à la Julian Ashton Art School, une école d’art influente en Australie, avant d’étudier à la University of New South Wales, l’Université de Nouvelle-Galles du Sud, un établissement situé à Kensington, un faubourg de Sydney, où elle a obtenu un Baccalauréat de français avec mention d’honneur. Au retour au Canada, elle a reçu un certificat professionnel d’enseignement à l’Université de Saskatchewan où elle a enseigné au niveau secondaire pendant quelques années avant de fonder une famille. Pendant les années qui ont suivi, elle a approfondi ses connaissances en dessin, en aquarelle, en peinture (huile et acrylique) et en techniques mixtes. En 1990, elle fonde la Blanchet Fine Arts School, une école privée et atelier, où elle réalise son rêve de toujours: avoir un espace où se dévouer entièrement à l’art. Avec l’encouragement de son mari et de ses quatre enfants, l’artiste s’épanouit dans son propre atelier. En 2012, Karen Blanchet est choisie comme représentante de l’Alberta avec une autre artiste. Les deux artistes discutent de la possibilité de former un groupe. Quatre ans plus tard, le groupe DEVENIR voit le jour. Elle obtient également un appui auprès de plusieurs grands organismes tant en Alberta qu’en Colombie-Britannique.
Pour certaines choses, «il y a beaucoup d’opportunités pour les artistes francophones qui ne sont pas disponibles aux artistes anglophones», avoue l’artiste en entrevue. Or, les lieux de diffusion où les artistes en arts visuels peuvent parler la langue de Molière ne sont pas légion. Karen Blanchet insiste sur le fait que, dans sa région, il n’y a aucune galerie commerciale pour les francophones qui souhaiteraient utiliser le français pour se faire servir. De plus, certains centres de diffusion ne vendent pas; ils se contentent d’exposer les artistes. «J’ai essayé de faire application dans une galerie commerciale et les dirigeants m’ont dit qu’afin que je sois associée au Centre d’arts visuels d’Alberta, ils ne me pouvaient pas m’accepter. CAVA ne vise pas les ventes. C’est plutôt une place pour les expositions».
L’artiste albertaine qui utilise le français dans sa communication, dans une proportion de 50 %, affirme qu’il y a très peu d’endroits en réalité pour utiliser le français dans les arts visuels. La proportion de l’utilisation de l’anglais est donc nettement supérieure dans ce milieu particulier. «Il faut insister pour avoir les services en français. Dire « Bonjour » en n’importe quelle circonstance».
Quand on lui demande si, à son humble avis, l’artiste francophone a autant de chance d’obtenir une subvention que l’artiste anglophone auprès du Conseil des arts du Canada ou de tout autre organisme mandaté afin d’aider financièrement les artistes en arts visuels dans leur développement de carrière, sa réponse est non ambiguë, c’est non ! «Les agents pour le Conseil des arts du Canada ont suggéré aux amis de faire leur application en anglais parce qu’il n’y a pas assez de juristes francophones disponibles. Ensuite, un juriste nous a dit que s’il voyait une application faite en anglais par des francophones, il la rejetterait tout de suite». Les luttes sont donc nombreuses pour les artistes francophones vivant dans un milieu majoritairement anglophone.
Au sujet du bilinguisme, il semble que l’utilisation du français en général ait augmenté au cours des dernières années à Edmonton, mais pas spécialement au niveau des arts visuels. Le marché de l’art en Alberta n’est pas le Klondike des arts. Le regard porté plus à l’Est semble plus optimiste. «Je crois qu’il y a un marché plus grand qu’ici. Mais il y a aussi plus d’artistes», pense l’artiste en parlant du marché québécois qui n’est pas non plus l’Eldorado canadien. L’argent étant le nerf de la guerre, la situation du français dans les arts visuels à l’échelle albertaine pourrait s’améliorer par une aide financière plus stable pour développer des réseaux professionnels à travers le pays. De plus, «les artistes/enseignants sont rares. Il n’y a pas d’écoles francophones qui se spécialisent dans les cours d’arts plastiques», explique Karen Blanchet. Une augmentation de l’utilisation du français, dans les arts visuels, pourrait néanmoins débuter par l’éducation spécialisée en français. Il y a visiblement un manque à ce niveau.
Les liens que les artistes en arts visuels pourraient tisser entre eux pourrait aider, mais le succès, selon Karen Blanchet, débute toujours par la région de l’artiste où qu’il soit au Canada.
L’angle de vue selon les chiffres
Près de 100 000 personnes francophones vivent actuellement en Alberta sur 4 026 650 habitants [1]. Selon la Fédération des communautés francophones et acadiennes du Canada (FCFA), il y a 10 millions de personnes qui parlent français au pays, dont 2,7 millions d’entre elles habitent ailleurs qu’au Québec [2]. Il existe d’ailleurs une carte interactive très utile pour retrouver toutes les ressources francophones au pays [3].
Karen Blanchet, Edmonton, Alberta
Pour retrouver l’artiste Karen Blanchet sur Internet:
https://karenblanchet.ca
Les images illustrant cet article sont diffusées avec la permission de l’artiste.
Les textes accompagnant les images
Oneing
Separateness is
illusion. Becoming One
sets us free to be.
Unification
Le seul Dieu invite
tous à la divinité
et co-création.
Wis/Sag 31:7
One Only
One with each other,
universal unity.
One in God and all.
Une
Une seul Dieu pour tous.
Juste une. Elle partage sa vie
avec tout le monde.
Is 45:21b
Sources:
[1] Le Recensement 2016 – voir le site [2] Fédération des communautés francophones et acadiennes du Canada – voir le site[3] Les communautés francophones du Canada – voir le site